Cette activité met au centre des échanges avec les Communautés, la question des impacts du pipeline et le processus d’indemnisation consécutif à la perte des moyens de productions sur la base des instruments juridiques ainsi que des bonnes pratiques en la matière. La campagne s’est déroulée du 11 au 25 Mars 2021, elle est financée par le ministère des affaires étrangères du Pays-Bas à travers le programme Voice au Niger.
A toutes les étapes de cette tournée à l’intérieur du pays, les membres de la délégation du ROTAB conduite par M. Aboubacar Illiassou ont entretenu les communautés concernées sur les véritables enjeux liés aux impacts socio-économiques du pipeline.
Dans la même lancée, du 18 avril au 02 mai 2021, le ROTAB a renforcé les capacités des membres des comités de vigilance. Il s’agit des formations et des séances de sensibilisation des communautés qui ont porté, entre autres, sur les procédures de fixation des indemnités d’expropriation pour cause d’utilité publique, l’éligibilité et le déplacement des populations, le lobbying et technique de plaidoyer, les risques liés à la présence du pipeline, les droits et les devoirs du citoyen.
Selon les organisateurs, cette campagne du ROTAB sera couronnée par un Forum qui aura lieu à Maradi et qui réunira les membres des cinq (5) Comités de Vigilance et de suivi des impacts liés à la présence du pipeline dans les cinq (5) Communes-pilote du projet à savoir N’Gourti, Tasker, Ourafane, Allela et Dankassari. Chaque Comité de Vigilance, précise-t-on, est composé de dix (10) membres : 4 femmes, 4 jeunes, 1 élu local et 1 représentant de médias (radio communautaire)
A noter que la campagne a suscité beaucoup d’intérêt dans les différentes localités et a impliqué les élus locaux, les femmes, les jeunes, les chefs traditionnels, les leaders communautaires d’opinions, les hommes de médias et les représentants de l’administration publique au niveau déconcentré.
De la procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique
L’Equipe du ROTAB à Ourafane avec le chef du canton lors de la campagne de sensibilisation
C’est un des points culminants qui a le plus marquée les échanges interactifs entre Consultants du ROTAB et Communautés riveraines du pipeline rencontrées sur le terrain. A comprendre les consultants, avant que cette déclaration d’utilité publique n’intervienne, une enquête d’utilité publique doit être effectuée afin d’informer le public. L’administration est libre quant au choix du moyen d’information. Quant à l’enquête d’utilité publique, elle est diligentée en Mairie à l’initiative du Préfet et est obligatoire sauf pour les projets qui intéressent la défense nationale. Le Préfet, aux termes d’un arrêté préfectoral, désigne le commissaire enquêteur et précise l’objet de l’enquête, la date à laquelle elle sera ouverte, le lieu où elle se déroulera, les lieu et heure où le public pourra prendre connaissance du dossier et formuler ses observations.
A qui est confiée la procédure d’expropriation ?
La procédure d’expropriation est confiée au Juge de l’Expropriation qui est un Juge auprès du Tribunal de Grande Instance. Son rôle est d’une part de prendre les ordonnances d’expropriation et d’autre part de fixer les indemnités revenant à l’exproprié. Il se prononce également sur un certain nombre de points qui sont la conséquence de l’expropriation tels que : la demande d’emprise totale lorsque seulement une partie du bien est touché par le projet de l’expropriation, la fixation de la valeur d’un bien dans certaines procédures parallèles telle que la fixation de la valeur du terrain retenu pour le calcul du versement du plafond légal de densité ou la fixation de la valeur d’un bien préempté par la Commune suite à sa mise en vente, les difficultés relatives à l’exécution d’une décision comme l’expulsion des occupants ou la fixation d’intérêts de retard.
La délégation du ROTAB à N’Gourti pour le renforcement de capacités
Lorsque le délai d’enquête fixé par l’arrêté préfectoral est expiré, le Maire clos et signe le registre d’enquête qui est transmis au commissaire enquêteur. Celui-ci examine les observations qui figurent au dossier et exprime son avis par écrit. Il transmet ensuite son dossier avec ses observations écrites au Préfet ou éventuellement au Sous-préfet. Le projet pourra être modifié par la suite à condition qu’il ne s’agisse pas de modifications importantes et qui ne dénaturent pas celui-ci. Dans le cas contraire, une nouvelle enquête d’utilité publique serait nécessaire. Ce n’est qu’à la suite de cette enquête d’utilité publique qu’est rendue la déclaration d’utilité publique.
L’équipe ROTAB à Tasker avec le préfet, le Maire et le Secrétaire Général de la Commune
L’ordonnance d’expropriation porte transfert de propriété des biens au profit de l’expropriant et doit donc être publiée et notifiée. Cette ordonnance peut être attaquée uniquement par le biais d’un recours en cassation dans un délai de 15 jours à compter de la réception par l’exproprié de la notification. Cette ordonnance produit trois effets : Elle rend l’expropriant propriétaire des biens expropriés et ce même si l’exproprié peut encore garder matériellement la jouissance du bien. Elle entraîne l’extinction des droits réels et personnels qui affectent l’immeuble.
De la fixation des indemnités
Localité d’Alléla en campagne
Selon les explications du Consultant, par cette ordonnance, le Juge de l’Expropriation doit fixer judiciairement les indemnités de l’exproprié et doit obligatoirement se rendre sur les lieux pour apprécier la valeur des biens. Cette décision n’interviendra que si aucun accord amiable n’a été trouvé entre l’expropriant et l’exproprié. Un tel accord est d’ailleurs possible tant qu’un jugement définitif n’aura pas été rendu. Ce jugement peut faire l’objet d’un appel si l’expropriant ou l’exproprié estime que l’indemnisation est insuffisante. Cet appel n’a aucun caractère suspensif, de sorte que le jugement rendu en première instance produit tous ses effets.
Rappel des enjeux économiques du pipeline Nigérien
Etape de N’Gourti pour la campagne
Long de 1 982 km, dont 1 298 au Niger et 684 km au Bénin, l’oléoduc représente un investissement de 4,5 milliards de dollars américains (4 milliards d’euros). Il comprend huit stations de pompage qui doivent être construites dont six (6) au Niger et deux (2) au Bénin. La production sera destinée à l’export, via le port en eau profonde de Sèmè-Podji, au Bénin. L’ouvrage permettra au Niger de multiplier par plus de cinq (5) sa capacité actuelle d’exportation en la faisant passer de 20 000 à 110 000 barils par jour. Certes, le projet de pipeline renforcera assurément la place du Niger dans le cercle des pays producteurs de pétrole sur le continent (après le Nigeria et le Ghana) mais sa réalisation n’est pas sans conséquences évidentes sur l’environnement et les conditions de vie des communautés riveraines de l’infrastructure.